Space Opera

Même augmentés, améliorés, immortels, que reste-t-il aux humains dans un monde où les intelligences artificielles sont capables en une seconde d’effectuer des calculs et des réflexions inaccessibles et même inconcevables aux plus brillants d’entre eux ? Désormais soutenue, guidée, materné par des machines quasi infaillibles, le génie humain ne s’exprime plus qu’à travers des arts inouïs, des fêtes inimaginables, des philosophies impensables pour de simples esprits du XX^ème siècle. Mais dans une société qui planifie minutieusement son développement jusqu’à la mort thermique de l’univers, n’est-ce pas un peu vain ? Où est l’audace, où est l’ambition ? Phaëton, lui, n’en manque pas. Et si ses projets doivent mettre en péril la sacro-sainte quiétude de ce soi-disant Age d’Or, et bien qu’il en soit ainsi.

La tâche colossale que s’est fixée John C. Wright est presque aussi ambitieuse que celle de son héros : nous décrire un futur de l’Humanité le plus lointain possible, non pas des centaines, ni même des milliers d’années dans l’avenir, mais des millions. Concepts, technologies et notions tous plus stupéfiants les uns que les autres s’enchaînent ainsi sans aucun temps mort dans un univers qui conserve pourtant une cohérence impressionnante. Beaucoup de lecteurs de SF poursuivent ce délicieux sentiment de vertige que l’échelle des événements, l’altérité des modes de pensée, la portée des technologies nous font ressentir dans les très grands romans du genre ; Tout au long de l’Oecumène d’Or, ce sentiment s’exprime à chaque page.

L’Aleph, c’est une avancée prodigieuse, miraculeuse, qui ouvre un champ des possibles absolument sans précédent. Mais c’est aussi un espace inexploré voire inexplorable, dont la compréhension n’est encore qu’à l’état d’ébauche. Et pourtant déjà des vaisseaux s’y élancent, brûlant d’enfin conquérir et exploiter les étoiles. Mais parmi ces pionniers de l’espace, pilotes, scientifiques, cyborgs et civils, certains voient dans l’Aleph plus qu’une simple opportunité à saisir. Ils en comprennent aussi la beauté, et la menace qu’il pose à l’Humanité autant que celle que l’Humanité lui pose. Et c’est par leur biais que Colin Marchika va exprimer toute l’originalité de son approche de la Science Fiction : bien plus que les mathématiques avancées, la technologie de pointe et les théories complexes, ce sont toujours les hommes qui font l’Histoire. Au fil de ces premières générations de défricheurs, les destins de ces gardiens de l’Aleph ne vont cesser de s’entrecroiser, leurs vies et leurs décisions tissant l’histoire secrète et intime de la Conquête de l’Espace.

  Depuis des siècles, les anciennes colonies Hain sont séparées les unes des autres, au point d’avoir oubliées qu’elles faisaient autrefois partie d’un même empire. Chaque planète a évoluée différemment, altérant en profondeur sa culture mais aussi ses habitants,  souvent de manière inattendue. Aussi, la tâche que s’est fixée la ligue de  l’Ekumen est immense : retrouver et réintégrer touts les héritiers des hainiens en une fédération à nouveau unique...
  Ce cycle qui n’en est pas vraiment un, chaque histoire pouvant se lire indépendamment, permet à la grande Ursula K. Le Guin d’explorer tous les thèmes qui lui sont chers, qu’ils soient culturels, politique, sociologiques ou philosophiques. Mais sans oublier de faire preuve d’une grande rigueur scientifique !

  Empire galactique plusieurs fois millénaire, la Culture est une véritable utopie. Sous la surveillance bienveillante des IA, les humains et leurs alliés jouissent d’une société égalitaire, hédoniste et richissime sans équivalent dans la galaxie. Mais cette galaxie, justement, abrite de nombreuses autres formes de vie, et les agents spéciaux du service Contact sont souvent confrontés à des situations très délicates...

  Fondation, Dune et Hypérion, les références incontournables dès que l’on parle d’Empire Galactique, ont en commun de nous proposer un univers uniquement peuplé d’humains, les  extraterrestres exotiques semblant dévolus à une SF plus pulp. Le cycle de la Culture fait pourtant de leur présence une de ses forces, la découverte et les interactions avec ces autres culture participant grandement à l’originalité de la saga. Chaque tome, présentant un héros et un lieu différent, peut se lire indépendamment.

  Tant d’existences, de destins entremêlés, de villes en villes, de planètes en planètes, de systèmes en systèmes, de galaxies en galaxies. Autant de rencontres, de décisions, de sentiments, de fils et de nœuds qui tissent à travers l’univers entier la tapisserie de l’Histoire de l’espèce Humaine. En l’espace de ces quelques pages et de ces quelques tranches de vies, Eschbach nous fait entrevoir toute la grandeur, l’écrasante démesure du concept même d’Empire Galactique, évoquant une échelle d’évènements absolument dantesques tout en se plaçant résolument à hauteur d’homme. De quoi faire reconsidérer complètement à son lecteur  les implications réelles de tout le genre  du Space Opera.